Dans un rapport rendu public le 4 juillet sur la crise anglophone, l’ONG Amnesty International constate que les combattants séparatistes s’attaquent en particulier aux Peuhls Mbororos, des populations nomades présentent dans les régions septentrionales, mais également dans la région du Nord-Ouest.
« D’après les chiffres établis dans le cadre de l’initiative Justice and Dignity Campaign, qui réalise un suivi des infractions visant spécifiquement des Peuls Mbororos, et en l’absence de chiffres officiels, 30 éleveurs Mbororos ont été tués par des “Ambas” dans le département de la Menchum entre 2018 et 2020, 35 dans l’arrondissement de Ndu (département de Donga-Mantung) entre 2018 et 2020 et plus de 50 dans l’arrondissement de Nwa (département de Donga-Mantung) entre octobre 2018 et mars 2021 », rapporte Amnesty International.
Si Amnesty note que « cela ne signifie pas que les Peuls Mbororos sont victimes en plus grand nombre que les autres communautés », l’ONG internationale souligne cependant qu’il existe un « climat d’hostilité à l’égard des Peuls Mbororos ». L’organisation rapporte en effet que « les Peuls Mbororos en tant que communauté sont visés par des discours discriminatoires et incendiaires de la part de porte-parole, de membres et de sympathisants de groupes séparatistes, d’après les documents vidéo, audio et écrits qu’Amnesty International a recueillis et examinés. (…) Les victimes Peulhs Mbororos ont souvent signalé que des propos racistes et xénophobes avaient été prononcés lors des attaques lancées contre elles par des séparatistes armés ».
L’un des épisodes les plus dramatiques de ce climat d’hostilité est le massacre de Ngarbuh de février 2020 lorsqu’en représailles, des Peuhls Mbororos soutenus par des soldats ont attaqué un village tuant une quinzaine de personnes, dont des femmes et des enfants. « Les discours discriminatoires à l’encontre des Peuls Mbororos se sont intensifiés après la tuerie de Ngarbuh, le 14 février 2020, lorsqu’il est apparu évident que l’armée camerounaise était accompagnée de membres d’un “groupe d’autodéfense”, Peuls pour la plupart », indique Amnesty International.
D’un autre côté, le rapport précise que les milices Mbororos se sont également constituées et commettent très souvent des exactions à l’encontre de la population. « Des milices composées principalement de Peuls Mbororos armés ont commis de nombreuses infractions à l’encontre de la population dans la région du Nord-Ouest, notamment des meurtres et des incendies de logements, qui ont conduit à des déplacements de personnes », rapporte l’ONG qui liste une série d’exactions répertoriées.
La crise anglophone naît en fin 2016 avec des revendications des enseignants et des avocats pour une meilleure prise en compte de la minorité anglophone. Ces revendications se transforment en émeutes puis en conflit séparatiste dès 2017 dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. « Plusieurs ONG ont estimé le bilan à plus de 6000 victimes, sans toutefois pouvoir étayer ce chiffre. Un décompte non officiel des pertes militaires a été réalisé par un militant actif sur les réseaux sociaux, qui a estimé que 1434 militaires avaient été tués dans le contexte de la violence armée au 26 juin 2023 », peut-on lire dans le rapport d’Amnesty Internationale.
SBBC