Ce constat soulève des questions sur la gestion des fonds publics et l’efficacité des mesures de performance appliquées aux dirigeants des entités publiques.
Dans une étude récemment parue intitulée « Combien l’État mobilise-t-il pour la rémunération des dirigeants des entités publiques ? », Pr Viviane Ondoua Biwolé révèle que sur la période 2020-2024, l’État a dépensé 48,4 milliards FCFA pour rémunérer les présidents de conseils d’administration (PCA), les directeurs généraux (DG) et les directeurs généraux adjoints. (DGA) des entreprises et établissements publics. « Soit 25 milliards pour les entreprises publiques et 23 milliards pour les établissements publics », note Viviane Ondoua Biwolé, enseignante d’université et chercheuse en management public. L’étude porte sur un total de 37 entreprises et 75 établissements publics.
L’on apprend ainsi que sur cette enveloppe obtenue selon la grille prescrite par le décret du 19 juin 2019 fixant les catégories, la rémunération, les indemnités et avantages des dirigeants des entreprises et établissements publics au Cameroun, environ 37 milliards de FCFA ont été versés à des dirigeants dont les entités présentent des performances peu éloquentes ou carrément négatives. Selon Viviane Ondoua Biwolé, « l’État dépense inutilement en payant les salaires des dirigeants sociaux contre-performants, car, ayant dégradé la valeur des entreprises (caractérisées par la baisse de la catégorie), et ceux qui sont peu performants, avec les entreprises qui ont stagné »,
L’étude indique que pendant la période sous revue, la DG de Cameroon Telecommunications (Camtel) a perçu plus de 885 millions FCFA de salaire, le PCA 195 millions FCFA, et la DGA plus de 692 millions FCFA, pour une masse salariale cumulée de 1,1 milliard FCFA sur 4 ans. La Camtel et la Société de développement du coton (Sodecoton) sont, par ailleurs, les entreprises publiques où les masses salariales des dirigeants sont les plus élevées. Ces deux entreprises sont suivies par la Société nationale des hydrocarbures (SNH), la Société nationale de raffinage (Sonara), et le Port autonome de Douala (PAD), dont les trois dirigeants cumulés ont perçu plus d’un milliard FCFA de salaire en 4 ans.
Pr. Viviane Ondoua Biwolé est celle qui a révélé que 43 PCA sont hors-la-loi. En effet, sept ans après la réforme des entités publiques, ces PCA sont toujours en poste. Pourtant, les dispositions de loi du 12 juillet 2017 sur les établissements publics et les entreprises publiques établissent clairement la durée du mandat des PCA à 3 ans renouvelable une fois. L’article 22, précise d’ailleurs qu’« en cas d’expiration du président du Conseil d’Administration, le ministre technique saisit l’autorité investie du pouvoir de nomination ». En clair, ces PCA exercent en marge de la réglementation depuis plusieurs années. « En tout état de cause, le PCA, dont le mandat est échu ne peut pas convoquer une session dudit Conseil au risque de nullité », indique le Pr Viviane Ondoua Biwole.