L’universitaire et analyste politique a publié une tribune sur Facebook le jeudi 16 septembre 2021 sur le rejet de l’Etat.
Selon le docteur en droit, il ne suffit pas pour les gouvernants de formuler quelques menaces inutiles lors des points de presse pour que les violences contre les policiers cessent.
Suite à la sortie du Minat qui s’est prononcé le 10 septembre dernier sur les récentes vidéos de violences exercées par des civils contre des policiers en fonction, Richard Makon a réagi. Selon l’enseignant-chercheur à l’Université de Douala, il ne suffit pas pour les gouvernants de formuler quelques menaces inutiles lors des points de presse pour conjurer un mal qui est profond.
Camerounactuonline.com vous propose le texte intégral.
LE REJET DE L’ETAT…
Il ne se passe pas un jour maintenant au Cameroun sans qu’un policier, un gendarme ou un militaire (c’est-à-dire un représentant de l’autorité de l’Etat) ne soit violemment molesté par un citoyen.
Le plus étonnant d’ailleurs c’est le nombre quotidien de rixes entre “hommes en tenue”, qui se livrent eux-mêmes en spectacle sans plus aucun respect pour leurs serments, leurs uniformes et leurs corps d’appartenance.
Cette désacralisation de l’uniforme et de la fonction est amplifiée par le rejet qu’ils suscitent auprès d’une partie de nos concitoyens, qui voient aujourd’hui les hommes en tenue et les élites comme des instruments de l’injustice et des forces d’oppression d’un ordre gouvernant qui s’est progressivement délégitimé par une malgouvernance criarde et des options politiques regrettables.
Cette violence du corps et des corps prend place dans une société qui vit depuis des décennies maintenant une véritable socialisation à la violence.
Depuis les épisodes des années 90 qui ont vu le pouvoir en place perfectionner une véritable technologie de la régression destinée à rétrécir l’espace des libertés politiques, jusqu’à l’avènement de la crise de l’anglophonie identitaire, en passant par l’explosion du terrorisme aux frontières Nord et Est de notre pays, jamais notre jeunesse ne s’était aussi familiarisée à la violence, au sang et à l’odeur putride de la mort.
La banalisation de la violence dans une société est un marqueur essentiel de son agonie et constitue des prémisses de la catastrophe.
Il ne suffit pas pour les gouvernants d’apostropher leurs concitoyens par médias interposés ou de formuler quelques menaces inutiles lors des points de presse pour conjurer un mal qui est profond.
Le problème c’est que l’Etat camerounais vit un véritable rejet de la part de ses citoyens. Ce rejet est dû à sa propre délégitimation !
L’Etat se délégitime tous les jours par une malgouvernance sans précédents (la CAN 2019, le COVIDGATE, le scandale du stade d’Olembe, les derniers exemples) et des options politiques hasardeuses qui constituent un dissolvant de l’unité nationale et qui favorisent la multiplication des attitudes de rejet de ses représentants et de contestation de son autorité…
Nous ne sommes malheureusement qu’à l’aube de la violence ! Les jours à venir au Cameroun n’augurent rien de bon…
Malheureusement…