La classe politique exige des enquêtes à la suite des révélations faisant état du paiement de pots-de-vin d’environ 7 milliards Fcfa à certains responsables de ces deux sociétés d’État par la multinationale Glencore.
Le Cameroun, à travers deux de ses plus grandes entreprises publiques, est éclaboussé par un nouveau scandale de corruption, cette fois à l’international. Il s’agit de la Société nationale des hydrocarbures (SNH ) et de la Société nationale de raffinage (SONARA ) dont des responsables auraient reçu des pots-de-vin d’environ 7 milliards de Fcfa de la part de Glencore Plc, une société multinationale anglo-suisse de négoce de matières premières et d’exploitation minière, pour favoriser les opérations de celle-ci au Cameroun.
L’alerte est de l’avocat et homme politique Me Akere Muna, qui rapporte l’information publiée le 24 mai 2022 par le Financial Times de Londres révélant que cette société étrangère va plaider coupable à des accusations de corruption devant la justice américaine. En début de weekend notamment le 27 mai dernier, Me Akere Muna, très sensible aux questions de corruption en Afrique et dans le monde, a saisi le président de la Commission nationale anti-corruption (CONAC) à l’effet d’ouvrir « une enquête des plus robustes sur cette sordide affaire qui implique deux des plus importantes entreprises publiques du Cameroun ».
Le pays est trempé dans cette affaire avec la Guinée équatoriale, la Côte d’Ivoire, le Nigeria, le Soudan du Sud, la République démocratique du Congo et le Venezuela. Une révélation du Serious Fraud Office (SFO) britannique qui, selon l’avocat international, « a inculpé la filiale du groupe, Glencore Energy UK, pour sept cas de pots-de-vin et de corruption motivés par le profit dans le cadre d’opérations pétrolières » dans ces pays.
934 162 500 000 Fcfa
À noter que le siège social de Glencore pour le pétrole et le gaz est à Londres et son siège social est à Saint Helier, Jersey. « Un paradis fiscal notoire », pour l’avocat camerounais. Ce système de corruption de l’un des plus grands négociants de matières premières au monde a été mis nu par des enquêtes américaines, britanniques et brésiliennes. À en croire le Financial Times, il s’agit d’un scandale d’environ « 934 162 500 000 Fcfa » que la multinationale devra payer en termes d’amendes.
Dans la même veine, la société « a plaidé coupable dans deux affaires pénales distinctes et a accepté de payer environ 685.085.500.000 Fcfa d’amendes pénales et de confiscations » pour des faits de corruption sur 10 ans. Et ce n’est pas tout ! S’appuyant à nouveau sur SFO, l’avocat indique que « les agents et employés de Glencore ont versé des pots-de-vin d’une valeur de plus de 15 569 375 000 FCfa pour un accès préférentiel au pétrole, avec l’approbation de la société ». Au terme leurs investigations, « les procureurs déclarent que la branche américaine de négoce de matières premières de Glencore a plaidé coupable d’avoir participé à un stratagème de huit ans visant à manipuler les indices de référence du prix du pétrole au États-Unis », rapporte Me Akere Muna qui suit ces enquêtes de près depuis 2018.
Joshua Osih
La justice elle-même n’est pas exempte de cet engrenage de « corruption criminelle ». D’où la stupéfaction du procureur américain Damian Williams pour le district sud de New York. « Glencore a soudoyé des juges pour faire disparaître des poursuites judiciaires. Au fond, Glencore a versé des pots-de-vin pour faire de l’argent des centaines de millions de dollars. Et elle l’a fait avec l’approbation, voire l’encouragement, de ses cadres supérieurs. Les accusations criminelles déposées contre Glencore dans le district sud de New York constituent une nouvelle étape pour montrer clairement que personne, pas même les multinationales ne sont au-dessus de la loi ».
Si « l’honneur » du Cameroun est une fois de plus «affecté» par cet autre scandale, Me Akere Muna regrette également que « ces pratiques (…) privent les citoyens des bénéfices de leurs ressources naturelles ». Il n’est pas le seul à s’en offusquer. La classe politique (exclusivement de l’opposition) fait chorus pour demander des comptes. Le cas du député du Social Democratic Front (SDF), Joshua Osih, qui a immédiatement saisi le président de l’Assemblée nationale pour la « constitution d’une commission d’enquête parlementaire sur les preuves de corruption à la SNH et à la SONARA par Glencore et demande de réparation chez Glencore ».
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