Les tensions entre le gouverneur de la région de l’Adamaoua, Kildadi Taguieke Boukar, et le maire de Ngaoundéré, Bobo Saliou, ont atteint un niveau critique avec l’interdiction par l’autorité administrative des meetings politiques organisés par le magistrat municipal.
Le 6 mars dernier en effet, le gouverneur fait publier un communiqué avec la mention « large diffusion », où il tance la « fourberie politique et une tendance malicieuse » des élus locaux de « certains partis politiques » qui organisent des meetings politiques à l’endroit des populations après la réalisation d’infrastructures socioéconomiques de base. Ces projets, tient à rappeler le patron de la région, sont réalisés « sous financements publics », et ne devraient dès lors faire l’objet d’appropriation afin de susciter des « remerciements » et des « motions de soutien » à l’endroit des exécutifs municipaux.
L’UNDP, le parti politique du maire Bobo Saliou, a remporté la mairie de Ngaoundéré lors des élections municipales de 2020, ce qui aurait suscité des inquiétudes au sein du RDPC au pouvoir. Certains estiment que l’interdiction des meetings du maire par le gouverneur vise à favoriser le RDPC et à affaiblir l’UNDP dans la gestion de la ville. Dans sa réponse, le maire Bobo Saliou a affirmé que les projets réalisés sont inscrits dans le Budget d’investissement public (BIP) et qu’ils bénéficient à l’ensemble de la population, quel que soit leur parti politique. Il a ironisé sur la sortie du gouverneur, la qualifiant de “publicité” pour lui.
Il est à noter que le RDPC et l’UNDP sont des partis alliés au sein de la majorité présidentielle, mais s’opposent fréquemment dans les élections locales. En effet, L’UNDP fait ainsi partie de la majorité présidentielle et son leader, Bello Bouba Maïgari, est ministre d’État. L’UNDP soutient le RDPC lors des élections présidentielles, mais les deux partis s’opposent, souvent violemment, dans les élections locales. La sortie du gouverneur ne serait alors qu’une tentative de voler au secours du RDPC et de brider les succès de l’UNDP dans la gestion de la ville.
« La pomme de discorde dans cette affaire vient de ce que le maire conduit la pose des pavés sur les routes avec les financements de l’État, notamment au niveau du quartier Bali. Sur les réseaux sociaux, il met en avant son parti l’UNDP dans ce projet. Ce qui agace le gouverneur qui a rendu public ce communiqué », commente un enseignant de l’Université de Ngaoundéré. Ce dernier ajoute : « Nous sommes à la veille des élections de 2025, donc c’est de bonne guerre ».